Dans un récent article publié par le think tank Africa Center for Strategic Studies basé à Washington, Paul Nantulya, chercheur associé au centre, analyse la montée en puissance de l’influence sécuritaire de la Chine en Afrique et l’élargissement de ses partenariats dans ce domaine. Vous trouverez ci-dessous un résumé de son analyse.
Le nouveau Plan d’action de Pékin 2025–2027 du Forum sur la coopération sino-africaine (FOCAC) marque un tournant stratégique : il contient davantage de dispositions sécuritaires que tous les plans précédents, traduisant l’ambition de la Chine de devenir un acteur sécuritaire de premier plan en Afrique, en complément de son influence économique.
En deux décennies, la présence militaire chinoise sur le continent a radicalement évolué. En 2000, moins de 5 % des équipements militaires africains étaient chinois. Aujourd’hui, 70 % des pays africains utilisent des véhicules blindés chinois et environ 2 000 officiers africains sont formés chaque année en Chine. Depuis 2006, la Chine a conduit 20 exercices militaires conjoints, dont les plus importants ont eu lieu récemment : exercices terrestres et navals avec la Tanzanie et le Mozambique en 2024, manœuvres aériennes avec l’Égypte en 2025. La marine chinoise maintient aussi une présence continue dans le golfe d’Aden avec 47 rotations d’escorte.
Cette intensification repose sur une vision sécuritaire façonnée par le Parti communiste chinois (PCC), où les notions de sécurité nationale, de stabilité du régime et de souveraineté du Parti sont étroitement liées. À l’export, cela se traduit par un soutien aux régimes partageant ces valeurs, avec une logique de sécurité de l’État plutôt que protection des citoyens. Ce modèle séduit plusieurs gouvernements africains, notamment ceux issus de mouvements de libération comme en Tanzanie, Namibie, ou Zimbabwe, qui bénéficient d’un approvisionnement militaire massif, de formations et d’infrastructures bâties par la Chine.
Par ailleurs, la Chine élargit ses partenariats militaires à des pays non traditionnels comme le Sénégal et le Kenya, à travers des coopérations mêlant ventes d’armes, entraînements, projets d’infrastructure et liens entre partis politiques.
Enfin, un nouveau champ d’action se développe autour de la production conjointe d’équipements militaires : l’Algérie construit des corvettes avec la Chine, l’Ouganda fabrique des drones avec NORINCO, tandis que le Nigeria développe des munitions avec le même groupe.
Dans les années à venir, la Chine continuera probablement d’élargir son empreinte sécuritaire en Afrique. Il revient aux gouvernements et sociétés civiles africaines de garantir que ces engagements répondent aux intérêts des citoyens, ne compromettent pas la souveraineté démocratique et s’inscrivent dans une logique de transparence et de responsabilité.
POURQUOI C’EST IMPORTANT: Au delà de la livraison d’équipements militaires, l’intensification de cette coopération militiaire vient aussi avec une exportation volontaire ou pas des normes chinoises en matière de sécurité et de gouvernance dans le secteur. Dans un continent où le soutien à la démocratie reste grand, ce transfert de normes chinoises pourrait inquiéter une société civile et des populations qui autant veulent une stabilité de l’Etat, désirent aussi des régimes démocratiques.
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- Africa Center for Strategic Studies: China Widening Its Influence in Africa through Expanded Security Engagements par Paul Nantulya
