Lors d’une récente interview, l’ambassadeur des Etats-Unis auprès des Nations Unies (et ancien secrétaire d’Etat adjoint pour l’Afrique) s’est exprimé sur le rôle de la Chine dans le surendettement de l’Afrique en des termes que l’on pourrait qualifier au mieux d' »aveugles » (on pourrait aussi parler de « malhonnêtes ») :
MARGARET COLLINS : Pour en revenir à l’Afrique, la Secrétaire d’Etat Janet Yellen était également en Afrique le mois dernier. Elle a parlé de l’allègement de la dette dans certains endroits comme la Zambie, où vous avez aussi des gens comme la Chine qui pensent que la restructuration de certaines dettes n’est pas la bonne solution. Quel est votre point de vue sur l’allègement de la dette de certains de ces pays d’Afrique qui sont vraiment en difficulté ?
LINDA THOMAS-GREENFIELD : J’ai travaillé au Bureau de l’Afrique au début des années 2000 lorsque nous avons travaillé – l’administration de l’époque a travaillé pour aider les pays africains à résoudre leurs problèmes liés à la dette, et la Chine est arrivée et a ré-endetté ces pays. La visite de la secrétaire d’État Yellen a donc, je pense, mis en lumière certaines de ces questions et souligné nos efforts pour aider ces pays à résoudre leurs problèmes de dette et à aller de l’avant.
QU’EST-CE QUI NE VA PAS DANS SON ANALYSE ?
- Elle surestime largement le rôle de la Chine : Chatham House estime que la dette chinoise représente environ 12 % du fardeau total du continent.
- Elle nivelle l’Afrique : Une dizaine de pays africains ont une dette chinoise importante (et très différente). Les autres n’en ont pas.
- Elle ignore la dette privée occidentale : Environ 40 % de la dette de l’Afrique est contractée auprès de prêteurs privés, dont beaucoup sont basés aux États-Unis.
POURQUOI EST-CE IMPORTANT ? Le problème le plus flagrant dans les commentaires de Thomas-Greenfield est qu’elle semble supposer qu’après l’allègement de la dette, les pays africains devraient en quelque sorte avoir cessé d’emprunter. Cela soulève la question de savoir comment ils peuvent se permettre de construire des routes et d’autres infrastructures. De la part d’une ancienne secrétaire d’État à l’Afrique, cette indifférence à l’égard des besoins de développement de l’Afrique et de son manque d’options de financement est… frappante.
LECTURES ET VIDÉOS :
- Bloomberg TV : US Ambassador to UN Thomas-Greenfield on Somalia, Russia, China
- Chatham House : The response to debt distress in Africa and the role of China par Alex Vines, Creon Butler and Yu Jie