La signature, en République démocratique du Congo, de l’accord mettant fin à la dispute entre le chinois China Molybdenum – CMOC, et son partenaire, la Gécamines, a été l’opportunité de recueillir l’avis de l’ambassadeur de Chine en R.D. Congo, monsieur Zhu Jing, sur le dénouement de cette crise.
Fidèle à un certain degré de réserve diplomatique, L’ambassadeur ne s’est pas étendu sur le fond de l’accord – il n’y a du reste pas grand-chose à dire puisque les détails de l’accord n’ont pas encore été publiés – et s’est contenté d’exprimer sa joie et son optimisme quant à l’avenir de la coopération sino-congolaise qui devrait se renforcer.
Sur l’accord entre la Gécamines et CMOC
« Je suis heureux d’apprendre cette nouvelle [Ndlr : conclusion de l’accord Gécamines & CMOC]. C’est une solution amiable et un accord gagnant-gagnant qui démontre que les entreprises chinoises et leur partenaires congolais sont capables de régler leur désaccord par le dialogue amical qui est le seul moyen à régler adéquatement les divergences de coopération. Cet accord témoigne aussi de la volonté partagée de la Chine et de la RDC à renforcer leur coopération gagnant-gagnant et hisser cette coopération à un niveau plus élevé ».
Son commentaire sur le désir de la RDC et la Chine de renforcer leur coopération fait certainement écho à la dimension géopolitique qui avait entouré cette dispute.
Pendant longtemps, cette dispute et celle concernant le contrat Sicomines, ont été perçues par plusieurs analystes et médias occidentaux, comme une volonté congolaise de réduire l’influence et la présence chinoise dans le secteur minier congolais et ce avec le soutien des Etats-Unis. Cet accord vient raconter une tout autre histoire.
Au cœur de la dispute, les relations entre les deux partenaires s’étaient sensiblement tendues, faisant craindre une rupture définitive. Des tensions qui, selon l’ambassadeur, n’étaient réellement dues qu’à une lecture et compréhensions différentes entre les deux parties.
« Il est vrai que les positions des deux parties ont été loin l’une de l’autre du fait que les deux parties avaient des compréhensions différentes de leur contrat et des usages internationaux. Mais les deux parties ont persévéré dans les efforts de mener des dialogues et des discussions pour aboutir enfin à un accord. Même les meilleurs partenaires peuvent avoir des divergences. L’essentiel, c’est de les régler par des discussions rationnelles et amicales ».
Quid de la Sicomines ?
L’accord entre la Gécamines et CMOC pourrait ouvrir des perspectives quant à une possible solution sur la dispute qui oppose le consortium des entreprises chinoises et le gouvernement congolais, sur le contrat de la Sicomines.
Contrat signé en 2008 entre le gouvernement congolais et des entreprises chinoises qui, en échange d’un accès aux minerais de cuivre et cobalt, devraient investir 3 milliards de dollars américains dans les infrastructures en R.D. Congo.
Quinze après, le gouvernement congolais non-satisfait de son exécution, réclame 17 milliards de dollars de plus à investir dans les infrastructures.
Le président congolais, Felix Tshisekedi avait en mars dernier exprimé « l’impérieuse nécessité d’une révision de cet accord afin qu’il profite davantage aux congolais. »
Volonté à laquelle semble souscrire l’ambassadeur de Chine qui reste optimiste quant à, là aussi, une solution amicale entre le consortium des entreprises chinoises et le gouvernement congolais.
« Je n’ai pas été pessimiste là-dessus [Ndlr : possibilité d’un accord entre la Sicomines et le gouvernement congolais]. L’objectif initial du “Contrat chinois”, c’est d’aider la RDC à mieux se développer. Depuis sa mise en exécution, cette coopération a apporté des contributions incontestables et palpables à l’émergence du secteur minier et à la construction des infrastructures en RDC. Ce sont des faits qu’aucun ne peut nier.
Actuellement, malgré des points de vue différents entre le Consortium des Entreprises chinoises et la partie congolaise, la poursuite de la coopération demeure leur consensus. Une remise à plat n’est dans l’intérêt de personne. Les pourparlers consistent plutôt à optimiser les choses, afin de rendre la coopération plus gagnant-gagnant et de faire davantage bénéficier la partie congolaise. C’est non seulement l’attente de nos amis congolais, mais aussi la volonté de la partie chinoise. Je suis convaincu que les deux parties jouissent de la sagesse et de la capacité suffisantes pour trouver un terrain d’entente et de régler leurs divergences par des discussions rationnelles, pragmatiques et amicales.»
Coopération sino-congolaise
Et pour finir, l’ambassadeur Zhu, a exprimé son optimisme quant à l’avenir de la coopération sino-congolaise.
« La Chine est un partenaire fiable sur lequel la RDC peut compter. La RDC voit aussi la Chine comme un partenaire particulier. Le partenariat sino-congolais doit absolument aller de l’avant, au lieu de faire marche en arrière. Le bénéfice mutuel et la coopération gagnant-gagnant constituent la nature fondamentale de ce partenariat.
Aujourd’hui, la Chine est entrée dans une nouvelle phase de développement. Elle poursuit l’ouverture de haut niveau et un développement de haute qualité. La Chine continuera à accompagner la RDC dans son édification nationale et à lui apporter d’énormes opportunités de développement. A part le secteur minier dans lequel la RDC a connu un redressement spectaculaire soutenu par des investissements massifs chinois, la coopération sino-congolaise pourra se diversifier davantage dans les domaines des infrastructures, de l’industrie, de l’agriculture et de la formation professionnelle, pour mieux répondre au besoin de développement de la RDC.
La Chine est aussi prête à faciliter l’entrée des produits congolais sur son marché. Je suis convaincu qu’au fur et à mesure que la coopération sino-congolaise s’intensifie et se perfectionne, nos amis congolais vont en tirer davantage de profit réel et voir leur vie s’améliorer. »
La R.D. Congo, premier producteur mondial de cobalt, espère tirer avantage de la transition énergétique et devenir notamment producteur de batteries pour véhicules électriques. Aujourd’hui la véritable question qui demeure est celle de savoir comment la Chine, premier investisseur dans le secteur minier congolais, compte-t-elle concrètement accompagner la R.D.Congo dans la réalisation de cette ambition. Dans les mois et années qui viennent la R.D.Congo, comme plusieurs autres pays producteurs, attendra bien plus non seulement de la Chine mais de tous les investisseurs miniers présents dans le pays.