Alors que les Etats-Unis tentent depuis plusieurs années à contrer l’influence grandissante de la Chine dans les pays du Sud et en Afrique, les récentes coupes budgétaires décidées par le département américain de l’efficacité gouvernementale (DOGE) dirigé par Elon Musk, qui ont frappé l’USAID, et qui menacent aujourd’hui la diplomatie américaine, pourraient bien entraver les efforts entrepris sous l’adminstration Biden dans cette direction et posent la question de l’approche et la stratégie diplomatique de la nouvelle administration dans cette guerre d’influence en Afrique.
Ces coupes budgétaires fragiliseront davantage des missions diplomatiques américaines en Afrique qui sont déjà en manque criant de personnel. Alors que la Chine renforce son influence en Afrique et y diversifient ses engagements, la décision de l’administration Trump est contre-intuitive et surtout face à des missions diplomatiques chinoises sur le continent plus robustes et nombreuses – 53 missions diplomatiques pour la Chine en Afrique contre 49 pour les Etats-Unis.
La fermeture potentielle de plusieurs ambassades et consulats, notamment en Afrique australe et dans le Sahel, ainsi que l’annulation de 83 % des programmes de l’USAID, mettent en lumière un désengagement des États-Unis en Afrique et surtout privent Washington d’un levier essentiel de sa politique en Afrique : l’aide au développement, qui était pendant longtemps un outil clé de l’engagement diplomatique américain, non seulement avec les gouvernements mais aussi avec la société civile africaine. Une aide au développement qui était aussi malheureusement la perception africaine de la diplomatie americaine: Afrique un continent en besoin d’aide.
Il s’agissait aussi d’un domaine sur lequel les Etats-Unis avaient un avantage considérable sur la Chine qui elle, donnait priorité à une approche à une diplomatie économique, privilégiant prêts massifs, projets d’infrastructures et miniers et accords commerciaux.
La réduction des missions diplomatiques américaines en Afrique refléterait ainsi les priorités de l’administration Trump qui pourrait bien se concentrer sur certains pays clé et sujets précis en lieu et place d’un engagement diplomatique plus large qui incluerait des pays qui ne seraient pas importants pour Washington. Ce qui pourrait expliquer le besoin de réduire les engagements diplomatiques dans ces pays perçus comme moins importants par la nouvelle administration.
Une approche pragmatique sur un point de vue financier, mais qui va cependant laisser le champ libre à Pékin dans ces « petits » pays ou régions perçues comme secondaires pour l’administration Trump.
Si elle venait à réduire sa présence diplomatique en Afrique, Washington enverrait un signal négatif aux décideurs africains, et renforcerait la perception d’une maison blanche complètement désintéressée par l’Afrique. Une perception qui permet de questionner la fiabilité des Etats-Unis comme partenaire pour le continent. L’Afrique devra t-elle continuer à compter sur les Etats-Unis à l’avenir?
Dans ce contexte, le désengagement diplomatique des États-Unis renforce le narratif de Pékin qui se présente comme un partenaire fiable et stable pour l’Afrique. Un partenaire prêt à s’engager dans une réforme d’un système international jugé injuste vers un système plus équitable au service de tous et non uniquement des plus puissants.
Bien qu’il soit difficile pour la Chine en ce moment de combler le vide laissé par le départ de l’USAID et d’autres programmes d’aides americains, le recul diplomatique américain combiné à ce qui parait comme une difficulté de l’administration Trump à articuler une politique africaine cohérente – Donald Trump n’a toujours pas désigné les personnes en charge de l’Afrique au sein de son administration – offre une opportunité réelle pour la Chine de consolider son influence en Afrique.
En conclusion, si ces coupes budgétaires aideront les Etats-Unis à faire des économies, cependant elles ne lui permettront pas d’être plus présents en Afrique et ailleurs.
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