Chaque année les chiffres du commerce Chine-Afrique mettent en lumière le grand déséquilibre des relations commerciales entre la Chine et l’Afrique.
Autant les autorités chinoises peuvent se féliciter de l’augmentation de ces échanges commerciaux – 295 milliards $ en 2024, compare à 282 milliards $ en 2023 – autant les dirigeants africains eux, ont de quoi se plaindre face à une balance commerciale largement déséquilibrée et déficitaire au profit de la Chine.
Les chiffres publiés la semaine passée par les douanes chinoises confirment cette réalités, 178 milliards $ d’export de la Chine vers le continent et 116 milliard d’imports – avec un accent particulier pour les matières premières –, soit un déficit commercial de près de 62 milliards de dollars pour l’Afrique.
Depuis quelques années déjà la Chine tente, avec plusieurs initiatives de réduire ce déficit. Des importations de fruits du Kenya, d’Afrique du Sud à la levée des droits de douanes des importations des pays à faibles revenus, ces mesures semblent ne suffisent pas à corriger ce qu’on pourrait considérer, à tort ou à raison, d’être une anomalie des relation commerciales entre la Chine et l’Afrique.
Une anomalie qui est autant le reflet l’asymétrie économique des deux partenaires que celui de la seule position que semble être capable d’occuper l’Afrique dans l’économie mondiale.
En 2024, le PIB du continent Africain s’élevait à 2.8 trillions $ alors que celui de la Chine c’est 18.8 trillions $. ; et c’est sans compter la position dominante de la Chine dans l’industrie manufacturière mondiale – 35% des parts mondiales – et où l’Afrique est absente.
La réalité est telle que le continent n’est structurellement pas équipé pour rééquilibrer ses relations commerciales avec la Chine qui a une plus grande capacité manufacturière. La preuve est qu’elle peine à tirer avantage de la levée des droits de douanes décrétée par Pékin.
À l’exception de quelques pays et quelques produits, la très grande partie des produits finis consommés sur le continent sont importés alors qu’elle, l’Afrique, ne se limite qu’en exporter les matières brutes.
C’est un peu à ce rôle de producteur de matière première brut que le système économique mondial a réduit le continent : Pourvoyeur des matières bruts et consommateur des produits finis moins chers, car du reste les plus coûteux et ceux de haute gamme sont destinés à des marchés plus riches et plus développés.
Le déficit commercial entre la Chine et l’Afrique va donc au-delà d’un simple narratif d’exploitation de la Chine vers l’Afrique, ou des mesures ponctuelles aux effets limités que Pékin pourrait prendre. Il s’agit de bien plus. Il s’agit d’agir directement en Afrique pour y développer une industrie manufacturière forte et compétitive. Il s’agit donc de travailler pour sortir de l’Afrique de son simple rôle de fournisseur mondial des matières premières.
Certains évoqueront responsabilité de la Chine dans la difficulté de voir émerger une industrie locale africaine, pointant du doigt ses exportations moins chers qui font du mal à l’industrie locale Africaine. Aussi partiellement vrai puisse-t-il être et séduisant, il faudrait résister à la tentation d’en faire LA cause principale de la situation de l’Afrique. Il faudrait éviter un narratif simpliste qui fait fi des innombrables problèmes structurels internes au continent – absence ou incohérence des politiques économiques et industrielles – qui constituent de véritables obstacles aux industries locales. Que dire des systèmes de prédation économique mis en place par des élites politiques corrompues et affairistes ?!
C’est dire donc qu’il faut aller bien au-delà de ce narratif pour comprendre la situation du continent.
Mais est-ce à dire que la Chine n’y peut rien ? Que Nini !!! Avec des centaines de milliards de dollars prêtés sur le continent et un flux d’investissement directs en croissance, la Chine a le potentiel et les atouts qu’il faut pour accompagner le développement d’une industrie locale sur le continent.
On le voit en Éthiopie ou au Sénégal où des investissements dans le secteur vestimentaire a permis à ces pays de produire des habits qui sont exportés à travers le monde.
Si la Chine veut réellement aider l’Afrique, elle devra aller au-delà des mesures qu’elle a prises jusque-là. Elle devra s’engager à investir avantage dans le mid et downstream de la chaine de valeur des matières premières – mines, agricultures – sur le continent. A défaut de le faire volontairement, elle y sera contrainte comme on le voit déjà avec les minerais critiques de la transition énergétique.
Mais en définitive, la responsabilité reviendra d’abord aux pays africains de créer les conditions favorables à ces investissements, non seulement pour les Chinois mais aussi pour le reste de ses partenaires économiques et commerciaux. La détermination affichée pour obtenir une chaine de valeur avancée pour les minerais critiques devra être la même pour les autres secteurs de l’économie.








 
							
 
							
