Ça fait exactement 35 ans, sans interruption et même durant le Covid, que la diplomatie chinoise a créé une tradition de réserver le premier voyage diplomatique de l’année à l’Afrique.
Une consistance qu’aucun autre pays du conseil de sécurité ou même de l’OCDE ou dans le monde ne saurait s’en targuer vis-à-vis du continent. Une régularité qui démontre une volonté de maintenir un contact permanent avec l’Afrique. Une consistance qui communique un message d’importance, comme quoi la Chine considère l’Afrique importante. Assez importante pour en faire désormais une règle de sa diplomatie.
Une tradition qui a commencé en 1991, bien avant le début des années 2000, point de départ de l’engagement chinois envers l’Afrique que nous connaissons aujourd’hui.
Une consistance qui lui permet de se présenter comme l’ami du continent. Et difficile de lui contester ce narratif dès lors qu’au-delà des prêts, ses engagements financiers, ses investissements, ses infrastructures, ses ventes d’armes sur le continent, cette régularité diplomatique démontre un engagement diplomatique incontestable.
Ces voyages sont devenus une tradition telle que le choix des pays visités – Namibie, Congo Brazzaville, Nigéria et Tchad cette année – fait désormais débat. Expert, analyste, diplomates et parfois même dirigeants des pays concernés se perdent en conjecture en cherchant à comprendre pourquoi et comment Pékin fait sa sélection.
Et chaque année c’est à une gymnastique mentale à laquelle s’adonnent experts, analystes et éditeurs pour tenter de fournir une sorte d’explication profonde et géopolitique – comme si une simple visite diplomatique ne suffisait pas – à ces choix.
La faute à un appareil politique et une diplomatie chinoise qui nous donnent souvent l’impression de ne jamais rien laisser au hasard. Tout ce qui est fait devrait avoir une signification profonde et surtout géopolitique. L’engagement de Pékin sur le continent étant perçu, légitimement peut-être, sous cet angle, il devient donc difficile de ne pas succomber à la tentation d’analyser au-delà de ce qui peut être simplement de la diplomatie.
La vérité est qu’il est très souvent difficile de lire et de comprendre les motivations chinoises derrière ces choix. Si le choix de certains pays « fait du sens », d’autres sont simplement un peu plus difficile à comprendre. La réalité est qu’il y a certainement une combinaison de facteurs… mais aussi et simplement de la diplomatie.
Rien de profond, rien de forcément géopolitique ou d’économiquement stratégique… simplement de la pure diplomatie. Une diplomatie où ces visites comptent et valent beaucoup. Pour vous donner une idée, il suffit de vous rappeler que les Etats-Unis en décembre 2022, lors du sommet US-Afrique, avaient pris l’engagement d’accroitre leurs engagements/voyages diplomatiques de haut niveau vers le continent… pourquoi ? Parce que ça compte !
Quand bien même cette tournée ne serait ponctuée d'aucune grosse déclaration et de promesses, résistons à la tentation de minimiser la régularité et la consistance de cette tradition diplomatique.
Avec le recul financier de Pékin sur le continent, il nous faudra certainement apprendre à apprécier la diplomatie pour ce qu’elle est … une histoire de protocole et de tradition. Et dans les relations entre les pays, ça compte beaucoup.









